Genèse
Comme souvent avec les Rues de Lyon, le projet du numéro sur « Le massacre du fort de Côte Lorette » vient d’une demande extérieure. Ici le sujet est proposé à l’association par le personnel de la médiathèque de St Genis Laval à l’occasion des 80 ans de l’évènement. Nous sommes deux dessinatrices à marquer notre intérêt pour ce projet : Nathalie Vessilier et moi même. Nous déciderons qu’elle fera le scénario et le story-board et moi le dessin.
Historique
Le massacre du fort de côte Lorette à St Genis Laval, a lieu en août 1944 dans le cadre du repli des allemands de la fin de la seconde guerre mondiale. Pour ne pas laisser de témoins derrière eux, ils décident d’exécuter l’ensemble des prisonniers de guerre alors détenus à la prison Montluc. On estime que plusieurs centaines de mise à mort auront lieu avant la libération de Montluc puis de Lyon en septembre. C’est à St Genis Laval que se déroulera l’exécution la plus importante : ~120 personnes. Les exécuteurs, allemands et français, se montreront particulièrement violents dans leur volonté de faire disparaitre les corps, ce qui fait, qu’aujourd’hui encore, on ignore le nom de certains corps retrouvés là-bas.
Recherche
Direction dans un premier temps, comme souvent, les archives départementales. Nous compulsons tout ce que nous pouvons trouver sur l’époque et l’évènement, dépositions, témoignages, articles de presses, lettres, registres…
Ma collègue Nathalie se rend au fort de côte Lorette lors d’une visite organisée par l’ASPAL (Association St-Genoise du Patrimoine des Arts et des Lettres), les lieux ont été transformés en lieu de mémoire, accueillant des plaques commémoratives et des éléments de médiations.
Puis nous rencontrons Monique Fillot membre de L’ASPAL, qui répond à nos questions et nous apporte des informations et sources complémentaires. En tant que dépositaire de nombreux témoignages directs d’anciens habitants et de familles des victimes, elle connait bien les faits et possède un grand nombre d’artéfacts de l’époque.
storyboard
Nathalie et moi décidons ensemble du découpage global et de la façon de traiter le sujet. Nous prenons le parti pris d’une vision non manichéenne, à l’échelle des individus. Comme il n’y a eu qu’un seul témoin direct du massacre en lui même, nous choisissons de le montrer tel que nous en avons le plus de témoignages, c’est à dire vu de l’extérieur, par les habitants de St Genis-Laval. C’est un choix narratif qui nous permet de ne pas sombrer dans les interprétations, suppositions et d’avoir une certaine pudeur vis à vis de la partie la plus violente des faits.
Tous l’enjeu pour nous est de trouver un juste équilibre entre montrer l’horreur, dénoncer, sans tomber dans le sensationnel et l’indécence.
Colorisation
Le storyboard finit par Nathalie, c’est à mon tour de dessiner. Lors du crayonné, nous modifions encore certains enchainements de cases. Mais peu à peu le découpage se fige. J’ai la chance comme pour mon premier numéro avec les Rues de Lyon, d’avoir une grande documentation graphique. Beaucoup de photos noir et blanc. Je fais le choix de ne pas me cantonner aux couleurs sépias que l’on voit souvent dans la BD historique. Au contraire, je ne veux pas éloigner le sujet de nous, je veux le rendre aussi proche que possible. Qu’il entre en résonance avec l’actualité politique.
Nous ne pouvons pas nommer toutes les victimes dans la BD en tant que tel. Mais dès que j’en ai la possibilité j’essaye de dessiner ceux dont on sait avec certitude qu’ils sont morts ce jour là et dont on a des photos. Je visite assez rapidement la prison Montluc, où je trouve des données complémentaires et visite les cellules où les victimes ont passés leurs derniers jours.
Je travaille avec des aplats au marqueurs, sur lesquels je viens dessiner aux crayons de couleurs. Un tout petit peu de marqueur noir fin ou de stylo gel blanc quand nécessaire. Calligraphies à part à l’encre noire pour les onomatopées. Le dessin des dix pages me prend environ 2 mois, crayonné et colorisation, une fois les phases de recherches finies et le storyboard arrêté.
Merci !
Pour aller plus loin sur ce projet, vous pouvez l’acheter pour la petite somme de 3 euros auprès des libraires partenaires de la région lyonnaise ou vous renseigner sur le site de l’épicerie séquentielle, l’association éditrice porteuse du projet.
Vous pouvez aussi le lire en ligne ici.
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